L’Académie internationale de quatuor à cordes de McGill est en passe de devenir la grande réussite de notre été : concerts tous gratuits et de haut niveau, salles combles, auditoires extrêmement attentifs où se côtoient des gens de tous les âges et de tous les milieux, dont beaucoup de jeunes découvrant à leur tour l’univers incomparable de la musique de chambre. Au traditionnel concert de clôture, vendredi soir, on retrouvait le réputé Quatuor Vogler, d’Allemagne, dont les membres figuraient parmi les professeurs invités cette année à l’Académie. Le Vogler en était à son quatrième concert à Montréal. Formé en Allemagne de l’Est en 1985, il joua trois fois au Ladies’ Morning Musical Club: en 1995, 1997 et 2000, et toujours dans sa formation actuelle. À cet égard, rappelons que la présidente du LMMC, Mme Constance V. Pathy, est aussi la fondatrice de l’Académie et la mécène qui en assume généreusement tous les frais. Son directeur général et artistique André J. Roy, en la remerciant au micro, a annoncé une cinquième Académie pour l’an prochain, du 10 au 23 août. Il a aussi invité à se lever les membres des jeunes quatuors stagiaires, qui avaient pris place un peu partout parmi les quelque 600 auditeurs.Spectacle impressionnant et, surtout, concert exceptionnel. Le Vogler est très certainement l’un des grands quatuors au monde actuellement. Cette précision dans le jeu individuel et collectif, cette rondeur dans la production du son, cette identification à l’esprit des oeuvres : quel bonheur pour l’auditeur, quelle leçon, aussi, pour les jeunes stagiaires.Dans le Haydn d’entrée, on reste pantois devant les pirouettes en chassé-croisé que multiplient les quatre coéquipiers au Menuet et devant les guirlandes de triples croches que dessine le premier-violon à l’Andante qui suit.Le Vogler emprunte ensuite la couleur exacte qu’appelle le lugubre 14e Quatuor de Chostakovitch. Tantôt seul, tantôt en dialogue avec un autre instrument seulement, le sombre violoncelle se voit confier ici un rôle important, le compositeur ayant dédié cette oeuvre au violoncelliste du Quatuor Beethoven, qui la créa en 1973 et l’enregistra l’année suivante.Le silence de la salle est incroyable. Comme si chacun avait saisi, à travers le Vogler, la pensée de Chostakovitch qui, avec des moyens modernes, a transmis la même angoisse que Beethoven dans ses derniers quatuors.L’opus 106 de l’aimable Dvorak complète la soirée. On aurait souhaité un choix plus intéressant que cet interminable exercice de 40 minutes dont le seul mérite est de donner beaucoup de travail aux musiciens. Cette musique ne dit pas grand-chose, mais elle est bien écrite pour le quatuor et le Vogler y apporte le maximum.
Claude Gingras / La Presse
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